le premier descriptif BYBLOS
Carrefour des
écritures
L'héritage
que porte l'antique ville de Byblos est immense. Elle occupe une place
considérable dans l'histoire du Proche-Orient ancien depuis près de 8000 ans.
Plusieurs villages néolithiques se sont ainsi succédés sur ce promontoire
dominant la mer, ce dont témoignent des tombes creusées dans le rocher, sous
les anciennes habitations. Le nom du site qui nous fut rapporté est Gubla,
toponyme sémitique mentionné tant dans les tablettes sumériennes que dans les
textes égyptiens dès le IIIe millénaire, et que les Grecs ont
vocalisé Bublos. Le nom a servi rapidement à nommer le papyrus qui
constituait une des sources de richesse de la cité ; il en est ensuite
venu à désigner les rouleaux sur lesquels furent consignés la plupart des
écrits : biblia – les livres. Le terme même de Bible s’est ainsi
imposé.
Soumise à des contraintes
géographiques qui conditionnent son destin, Byblos est tributaire des
influences de la mer et des contreforts du Mont-Liban. Des liens étroits et
durables ont ainsi été noués avec l’Egypte vers la fin du IVe millénaire. De la montagne, qui assurait une
régulière réserve d’eau, provenait la principale richesse du royaume de
Byblos : le bois de différentes essences, parmi lesquelles le cèdre, qui
était acheminé jusqu’au port et embarqué sur les navires vers de nombreuses
destinations.
Citée à plusieurs reprises dans la Bible
Un temple dédié à la « Dame de
Byblos » (Baalat Gubla), bâti vers 2800 avant notre ère, vers lequel
affluaient des offrandes venues de tous horizons, a été entretenu jusqu’à
l’époque hellénistique. S’y côtoient des cartouches de l’Ancien Empire
égyptien, des vases d’albâtre, de multiples objets votifs attestant de
l’importance du rôle cultuel de la ville de Byblos, qui comptait plusieurs
autres sanctuaires où s’entassaient des figurines humaines ou animales en
bronze. La cité a atteint une grande magnificence au début du IIe
millénaire, période marquée par la richesse et les rapports d’étroite
dépendance entretenus avec l’Egypte, ce qui ne l’empêche pas de s’assurer
progressivement une ouverture vers le monde égéen. De la période phénicienne (Ier
millénaire avant J.-C.) nous sont parvenues des inscriptions alphabétiques qui
s’étalent jusqu’à la conquête par la
Perse la Méditerranée
La philologie tient surtout avec
Byblos un des sites majeurs où exercer son investigation : hiéroglyphes,
syllabaires et alphabets se chevauchent, et certains documents retiennent
encore leurs secrets, faisant de la cité le symbole même de la fascination
exercée par les premiers témoignages de l’écriture. Les inscriptions
pseudo-hiéroglyphiques découvertes dans la cité constituent l’une des
caractéristiques de cette civilisation, composant une écriture syllabique
proprement originale, proto-linéaire, dont nombre d’aspects résistent encore au
déchiffrement. Des comparaisons avec les systèmes d’écritures égyptien, minoen,
chypriote, phénicien, proto-sinaïtique ont été avancées. Ont également été
découvertes des tablettes en caractères cunéiformes, des stèles contenant des
textes égyptiens, et diverses traces des origines alphabétiques du
phénicien ; à partir du Xe siècle, l’alphabet semble
définitivement constitué, probablement à Byblos, où le sarcophage d’Ahiram
présente le premier texte cursif et parfaitement clair en phénicien classique.
Or, en reprenant cet alphabet pour établir l’origine des différents signes, il
est désormais soutenu que quelques-uns d’entre eux dérivent de l’écriture
hiératique égyptienne. Ainsi, l’alphabet phénicien archaïque s’est débarrassé
de toute trace de syllabisme ; quant au tracé des signes, il est devenu
plus élégant, la taille des caractères s’est uniformisée, trouvant une forme
classique. Byblos a par ailleurs offert aux hellénistes et aux latinistes de
nombreuses inscriptions. Byblos ou la continuité des civilisations ;
Byblos ou la rencontre des écritures.